Le Baltimore Chop
Le Baltimore Chop n’a rien à voir avec du shopping, non Monsieur l’illustrateur ! Faudra penser à vous licencier…. Non, le Baltimore Chop, c’est le nom d’un geste au bâton pratiqué au baseball et qui a bel et bien disparu de nos jours. Honus s’intéresse à ce coup de Trafalgar, le dénommé "Baltimore Chop". Le Baltimore Chop, c’est la technique qui consiste au bâton à frapper trés fort au sol juste devant la plaque, histoire que la balle rebondisse trés haut, et que le rebond laisse le temps au coureur de prendre la première base avant que les défenseurs puissent faire le relais. Des joueurs ont inventé cette technique, c’était il y a bien, bien longtemps….. ce sont les Orioles des années 1890.
On l’a déjà dit, le baseball professionnel de cette époque est assez rugueux et joué par des durs. Les bagarres sont fréquentes, que ce soit entre joueurs, mais également entre joueurs et public qui n’hésitait pas à prendre parti durant un match. Peu de gants sont encore utilisés dans l’infield, les rotations sont uniquement de deux lanceurs, et surtout les règles du baseball ne sont pas encore fixées. Et comme il a été évoqué récemment dans un article sur King Kelly, la Dead Ball Era demeure une époque où le beau jeu se conjugue forcément avec tricherie et filouterie.
Dans cette époque du début du professionnalisme, les Orioles de la fin du XIXe siècle ont été une équipe hors du commun. Guidé par leur coach Ned Hanlon, ex-joueur des Detroit Wolverines, les Orioles ont tout gagné : soit les titres de la National league 3 années de suite, en 1894, 1895 et 1896. Ils ont surclassé tous leurs adversaires en inventant tout simplement ce que l’on appelle aujourd’hui communément le "Small Baseball" ou "Scientific Baseball", c’est à dire tout l’art de marquer des points en "jouant petit", collectif, malin.
Ned Hanlon, Période Wolverines, créateur du Small Baseball
Les Orioles ont inventé tout un ensemble de techniques dans le seul but de gagner : le "Bunt", le "Hit and Run", le "Squeeze play". Finalement, les joueurs de cette dynastie ont marqué l’histoire du baseball en créant de toutes pièces le jeu de baseball. Ce sont également eux qui ont inventé en défense le "Cutoff play" afin de tromper les coureurs adverses. Bien avant l’époque où le Home run allait devenir l’arme ultime (la Live Era inaugurée par le Babe), les Orioles ont défini à eux seuls les principes de jeu de la Dead Ball Era.
Les Orioles étaient connus pour être des joueurs hargneux et trés agressifs, prêts à tout pour gagner, que ce soit règlementaire, voire moins règlementaire.
4 superstars de l’époque :
Debout, Willie Keller et John Mc Graw "Little Napoleon"
Assis, Joe Kelley le Kingpin et Hugh Jennings
Les noms des joueurs vont parler aux afficionados du blog :
John Mc Graw surnommé "Litttle Napoleon" a été le troisième base de cette équipe, lui qui devient plus tard l’un des plus grands managers de l’histoire avec les New York Giants et l’un des plus féroces adversaires de la barrière des couleurs.
Wilbert Robinson, le catcher de cette dynastie, qui a imposé sa manière de jouer le poste de catcher en se plaçant toujours derrière le batteur durant toute la séquence, et non seulement à deux strikes comme le faisait la majorité des catchers avant ;
Hugh Jennings, le short stop, était un leader naturel, prêt à tout pour arriver sur base : il a été touché pas moins de 51 fois lors de la saison 1896, finissant un match dans un semi état de coma. Rapide et doté de mains trés sures, il détient toujours le record de 425 putouts en une saison…
Joe Kelley, en grand champ, était le capitaine des Orioles et était surnommé le "Kingpin" tant son autorité sur les autres joueurs était inébranlable.
On retrouve également Wee Willie Keller, tout simplement e plus grand bunter de l’histoire, qui a été longtemps le titulaire du record de 44 matchs de suite avec un hit, record battu par Joe Di Maggio. Pour lui le baseball est simple, c’est ouvrir les yeux et placer la balle où il n’y a personne ( »keep your eye clear, and hit ’em where they ain’t" comme il disait ).
Les Orioles ont ainsi façonné à tel point le baseball qu’ils sont à l’origine de modification de règles. C’est l’habileté de Keller à placer des bunts qui a même entrainé une nouvelle règle. Les équipes adverses ont multiplié les plaintes aux instances dirigeantes et ce afin que Keller cesse de bunter. Et en 1909, ils ont eu gain de cause, les règles ont été modifiées. Après deux strikes, un bunt en foul ball condamne le batteur à l’élimination. Keller est aujourd’hui au Hall of Fame comme tous les autres joueurs cités dans ce paragraphe.
L’une des innovations des Orioles a donc été le Baltimore Chop, crée semble t’il en 1896 par Wee Willie Keller sur les conseils de Ned Hanlon. Pour Keller, le Baltimore Chop visait à lober le joueur de première ou de troisième base après le rebond. Il nécessitait donc une frappe lourde devant la plaque, orienté plutôt vers les lignes. Le but premier était de déjouer les lanceurs habitués à jouer les bunts en défense contre lui. Le Baltimore Chop parfait était celui qui poussait le joueur en défense à attraper la balle comme un fly.
Wee Willer Keller, l’inventeur du Baltimore Chop
Tout ce qui n’était pas interdit par les règles était donc tenté par les Orioles. Ned Hanlon avait d’ailleurs l’habitude de rassembler ses joueurs les jours de pluie pour discuter stratégie et surtout les pousser à réfléchir. Hanlon voulait que les joueurs créent de l’inattendu, toujours dans un but de surprendre les équipes adversaires et gagner le match. Le contexte de règles encore minimales posées par la ligue nationale favorisait ce type de contribution.
Les Orioles ne reculaient devant rien pour tirer le maximum de profit de leurs technique, et même les jardiniers étaient mis à contribution. Selon le livre de Burt Solomon "Where They Ain’t", Tom Murphy, le groundkepper de l’Union Park le terrain des Orioles plaçait ainsi de la boue mixée à de l’argile devant la plaque de marbre et n’arrosait jamais le reste de l’infield et ce afin que les balles frappées aient le rebond le plus haut possible. Murphy était "l’arme secrète" des Orioles pour John Mc Graw.
Une photo du gang autour de Tom Murphy, l’homme en noir
Une nouvelle fois Keeler, Jennings, Kelly, Mc Graw réunis
Le baseball professionnel de cette époque était avant tout l’endroit ou tout ce qui n’était pas interdit était permis, et où seul le résultat comptait. Le grand nombre de paris opérés sur les parties à l’époque faisait du baseball le jeu du diable et de toutes les tentations. Les joueurs n’hésitaient pas à tricher, cracher sur la balle, cacher la balle, retenir le coureur, profitant du fait qu’il y avait un seul arbitre sur le terrain. Il faudra l’arrivée de personnalités trés strictes au poste de Commissionner comme le Juge Landis pour imposer un baseball plus propre, détaché des paris clandestins et doté de règles bien plus strictes pour éviter toute dérives.
Le déclin de la dynastie des Orioles a vu disparaitre l’utilisation du Baltimore Chop.
Aujourd’hui, lorsqu’il arrive que des joueurs frappent un Baltimore Chop, c’est souvent par inadvertance et cela est en général une frappe ratée, les bras des défenseurs alliés aux pelouses bien propres favorisant l’arrivée de balles rapides. Seuls les joueurs de softball pratiquent encore avec succès le coup du Baltimore Chop.
Le terrain de l’Union Park, domicile des Glorieux Orioles (1891-1899)
BHONUS :
Tous mes remerciements à Fred de Limoges qui m’a donné le sujet de cet article.
Si le sujet vous intéresse, il faut lire le livre de Burt Solomon
encore un must de la grande et de la petite histoire du Baseball !
monsieur francovanslyke,je n’aurais qu’un seul mot, ENORME !
Merci Franco, je me sens moins seul dans la dead ball era 😉
Excellent article. Effectivement, on l’a vu avec Jim Creighton puis King Kelly et maintenant avec les Orioles des années 1890, on avait à la fois un baseball sale et beau à la fois, où la tricherie ne faisait que donner plus de relief au jeu. Tous ces joueurs furent des pionniers et ils ont, à leur manière, créer le jeu et permis de le faire évoluer, parfois contre eux !
Des superstars oubliés pour beaucoup mais tout aussi importantes que des Robinson, Ruth, Musial, Jeter ou Clemente !
je dirais même plus Exchellent chet article !
Excellent cet article !
Chi on ne peut plus chouer chur les mots… ch’etes vraiment dur.
Shinon ch’est un bien bel article MonShieur.