Gant de boxe et manche à balai : la naissance du Softball

Softball, fils du Baseball, petit-fils du Rounders et autres Thèques ou Schlagball, cousin au second degré du Cricket, grand frère du Wiffle Ball… Si on prenait le baseball comme point de départ d’un arbre généalogique, l’arbre serait bien fourni en branche. Et le softball aurait une place de choix, tant ce sport est aujourd’hui, dans le cœur des pratiquant-es, le pendant logique du baseball. Aux Etats-Unis, on se passionne pour le baseball, à travers la MLB -le Show-, mais on s’amuse au softball, le dimanche sur les terrains aménagés ou improvisés, autour d’un barbecue ou d’un pique-nique.

Mais si le baseball est un jeu devenu religion nationale aux Etats-Unis, à la fois emblème économique, patriotique et culturel d’une nation, le softball est resté un jeu. Non que le professionnalisme ne se soit pas emparé du marché. Non que le haut niveau ne se soit pas écarté du softball. Cependant, le softball n’a jamais atteint le niveau du baseball, économiquement, médiatiquement, culturellement. Le baseball a façonné l’Histoire des Etats_Unis. Le softball reste une histoire de copains. Il y a bien sûr des stars du softball, Jennie Finch en premier lieu. Mais Jennie Finch reste à des années lumières des Prince Fielder ou Justin Verlander. Il y a du softball de haut niveau. Mais la NPF (National Pro Fastpitch) n’est en rien comparable à la MLB. Alors oui, le baseball raconte une histoire. Et même beaucoup d’histoires. Honus… et ses lecteurs… en sont friands. Mais le softball aussi sait raconter de belles histoires. Souvent plus intimes, plus contemporaines, plus féminines aussi. Parfois tout aussi ancienne que les histoires de baseball. D’ailleurs, ces deux disciplines ne viennent-elles pas du même siècle ?

 1887. Jour de Thanksgiving. Chicago. Une vingtaine de jeunes hommes étaient réunis dans un gymnase au Farragut Boat Club, attendant le résultat du match de football américain entre les université de Yale et d’Harvard. Ce sport, qui débarqua une douzaine d’années plus tôt dans la vie des américains, devint très vite une passion pour ces derniers. Et ces confrontations donnaient (et donnent encore) souvent lieu à des paris. George Hancock, reporter au Chicago Board of Trade, étaient des ces parieurs qui attendaient les résultats du match. Cette année-là, Yale remporta le match.

Une découverte, une invention, un événement tient finalement à peu de choses. Ce jour-là, les paris entre supporters de Yale et Harvard auraient pu être payés et chacun s’en serait retourné chez lui, certains déçus, d’autres heureux d’avoir gagné quelques billets grâce à leur équipe préférée. Mais ce jour-là, une fois les paris payés, il en fut autrement. Un partisan de Yale s’empara d’un gant de boxe qui traînait à côté de lui et le lança vers un supporter d’Harvard qui s’empara à son tour d’un bâton et frappe le gant de boxe. Bagarre générale ? Eclats de rire ? Fin de l’histoire ? Non, car ce geste qui aurait pu être le geste d’un moment fugace, sans suite, accoucha d’un « Let’s Play Ball ». « Jouons à balle » cria George Hancock, reporter du Chicago Board of Trade, parieur et… inventeur du softball. Il attacha la balle de manière à ce qu’elle ressemble à une balle, cassa un balai pour se servir du manche comme une batte et traça sur le sol des lignes pour créer un petit terrain de baseball dans le gymnase. Le jeu dura une heure et se termina sur le score de 41 à 40. Jeu improvisé. Moment de détente. Fin de l’histoire ?

Non. Ce qui aurait pu être un amusement temporaire un jour de Thanksgiving, un jeu sans avenir, le jeu d’un moment unique, allait traverser le temps grâce à George Hancock. Si enthousiasmé par sa trouvaille, il fabriqua dans la semaine une balle plus grosse qu’une balle de baseball, une batte avec une extrémité en caoutchouc, écrivit une première version de règles et retourna dans le gymnase peindre des lignes de jeu permanentes. Il nomma cette discipline : indoor baseball (baseball intérieur). Le succès fut important et immédiat dans la région de Chicago puis au-delà. Sa première version des règles du baseball intérieur fut publié en 1887 et distribué dans tout le pays. Au printemps 1888, son jeu se propaga à l’extérieur des gymnases et devint indoor-outdoor (intérieur-extérieur). Devant le succès et les évolutions que cela impliqua, il édita les règles de l’indoor-outdoor en 1889.

Les règles d’Hancock firent référence durant dix ans. Le jeu était joué ici et là dans les villes de l’Illinois et du Minnesota. Une ligue fut ensuite créée au Canada, à Toronto, en 1897. Mais à la fin du XIXème siècle, d’autres jeux, similaires, furent créés. Tous ces jeux -indoor-outdoor, kitten ball, pumpkin ball…- finirent par devenir le softball ! Mais ça c’est une autre histoire…

 

 

 

4 commentaires à “Gant de boxe et manche à balai : la naissance du Softball”

  1. […] plus grand des hasards par George Hancock. Vous pourrez trouver le récit de cette création dans cet article du site français de culture et d’histoire du baseball Honus.  Au départ, il est appelé indoor baseball (baseball d’intérieur) puis indoor-outdoor […]

  2. Fishiguchi dit :

    En tout cas, Gaétan, tu nous as gratifié (encore une fois) d’un bien bel article…

  3. Gaétan dit :

    En fait, il exista plusieurs versions de la grosse balle à cet époque, qui furent créer ne sachant pas qu’une autre avait déjà court dans une autre ville, autre région.

    J’essaierai d’y revenir en détails mais on peut citer la Kitten Ball, créer par un chef des pompiers en 1895 pour que ses hommes s’entretiennent physiquement entre deux interventions. Donc il est bien possible qu’ailleurs, le concept eut été repris ou ré-inventé.

    Finalement, si on joue à l’intérieur, il parit logique d’inventer toujours une balle qui casse pas !

  4. francovanslyke dit :

    Etonnant. je croyais que le softball avait été inventé par des ouvriers pour jouer au baseball dans les usines, leurs lieux de travail, à l’heure du repas, et ce sans casser le matériel. Les balles molles avaient été inventés dans ce but. je ne sais plus où j’avais lu cela…

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