Le Koshien le célèbre tournoi de baseball lycéen japonais vient de fêter ses 100 ans cette année. 100 ans qui ont forgé une véritable histoire du sport japonais. Sa première édition eu lieu en 1915, a connu une interruption durant la première guerre et rassemblait cette année 49 lycées, représentants chacun une préfecture. Si le Koshien regorge d’anecdotes, une surprenante histoire est celle du Lycée Kano en 1931 que nous relate Meddy, un de nos fidèles lecteurs. Merci à lui ! 

L’histoire du Koshien reflète évidemment l’histoire du Japon. En effet, la Corée et Taiwan ont fait partie un moment des conquêtes de l’empire Japonais. Conséquence de ces annexions, des équipes de lycée de ces territoires se sont retrouvées à participer au Koshien. Dans les années 1930, l’équipe du Lycée agricole Kano de la ville de Kagi (aujourd’hui Chiayi) s’est ainsi qualifiée à quatre reprises. Elle réunissait de fait des jeunes japonais, des Chinois et des aborigènes !  

Quand l’équipe de Kanō débarqua à Tokyo, elle n’était pas la seule équipe représentant les colonies japonaises : l’école de commerce de Kyōjō (Corée) et celle de Dairen (Mandchourie) étaient également présentes.

Pour ses trois premiers matchs, l’équipe taïwanaise fit des merveilles et étrilla ses adversaires, en cumulant 32 points contre 9 en trois rencontres. les Taïwanais se qualifièrent pour la finale et face à eux, se dressait l’école de commerce Chūkyōde de la ville d’Aichi.

Malheureusement, en finale, le pitcher de Kano, Wu Mingjie, épuisé par les nombreuses manches déjà lancées, perdit son contrôle et donna huit buts sur balles à ses adversaires. En face, le lanceur Yoshida Masao (surnommé La Grande Roue) domina les batteurs de Kanō. Le résultat fut sans appel : 4-0 et premier titre pour Chūkyōde qui entre 1931 et 1933 gagna trois couronnes consécutives.

Malgré cet échec en final, Kanō captiva les fans par son style de jeu et inspira même le célèbre écrivain Kikuchi Kan qui félicita l’équipe dans son article du lendemain pour le Osaka Asashi Shimbun. Les messages enthousiastes se multiplièrent dans la presse.

Après ce brillant parcours, les meilleurs joueurs de Kano furent sollicités par les grandes écoles nippones. Le lanceur Wu Mingjie, le champ centre Su Zhengsheng et l’arrêt-court Uematsu Koichi rejoignirent ainsi le Japon. 

L’équipe de Kano était affaiblie mais cela ne l’empêcha de revenir cinq fois au Koshien entre 1931 et 1936. Néanmoins, aucune de ces formations ne fit aussi bien et n’eut l’impact iconique de celle de 1931.

En 1935, l’escouade était menée par un lanceur aborigène, nommé Higashi Kumon dont la légende prétendait qu’il avait hérité son lancer sous-marin de son enfance. On racontait que, gamin, il lançait des pierres sur les oiseaux afin de les empêcher de voler les poissons pêchés par son père. En 1936, impressionnés par ses performances au Koshien, les Tokyo Giants envoient des représentants à deux reprises pour demander à Kumon de rejoindre leur équipe. Le lanceur refuse et préfère rester à Taïwan. 

Après cette glorieuse époque, l’équipe de Kano rentra dans les rangs et fut oubliée, même du côté de Taïwan qui, entre-temps, s’était libéré de la domination japonaise (1945).

Le lycée en bonne place au musée du Koshien 

Il fallut attendre le début des années 2010 pour qu’elle resurgisse des oubliettes de  l’Histoire. Elle inspira même un film intitulé "Kano",réalisé par le Taïwanais Umin Boya et sorti sur les écrans en 2014. La première eut lieu le 27 février 2014 à Taipei en présence des descendants de Wu Bo (1916-1987). 

Le film Taiwanais de 2014

Né à Taïwan, celui-ci joua pour l’équipe de Kanō mais il était trop jeune pour participer à l’épopée de 1931. On le voit garçon dans le film. Par la suite, il participa trois fois au Koshien et gagna le surnom de "Locomotive humaine" grâce à sa vitesse. Il devint professionnel au Japon sous le nom de Go Shōsei et remporta deux titres de meilleurs batteurs (1941-1942). En tant que pitcher, il lança aussi un no-hitter (!!) en 1946 et fut intronisé au Nippon Professional Baseball Hall of Fame en 1995.

Voici la bande-annonce de ce film. Je ne l’ai pas vu. Si certains ont eu cette chance, ils peuvent laisser leurs impressions…

BHONUS

Sources :

https://www.nippon.com/en/people/e00058/

http://ieas.berkeley.edu/events/pdf/2007.10.05_Morris.pdf

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